La baisse de la limitation de vitesse divise les associations. La Ligue contre la violence routière demande que la réductionde la vitesse de 90 à 80 km/h sur le réseau secondaire, qui sauverait des centaines de vies, soient adoptée sans délai.En 2012, les points des permis de conduire se sont envolés, selon le rapport annuel sur la sécurité routière remis vendredi par la DISR, la délégation interministérielle à la sécurité routière.
Faudra-t-il bientôt rouler à 80 km/h sur notre réseau secondaire en France au lieu de 90 km/h actuellement? Ce sujet a mobilisé une partie des débats du CNSR (Conseil national de la sécurité routière) qui, réuni vendredi à Paris, s’est penché sur un rapport d’experts qu’il avait commandé. Ces derniers devaient livrer diverses propositions pour faire chuter le nombre de tués et l’une d’elles préconise la baisse de la vitesse sur les routes bidirectionnnelles, les plus meurtrières en France.
L’heure n’était pas au vote, mais les conclusions de ces scientifiques ont suscité de vives réactions parmi les tenants et adversaires d’une nouvelle baisse des limitations, avec une préoccupation largement partagée: l’acceptabilité.
«85 % des Français sont hostiles à la réduction des vitesses»
Daniel Quéro
Même si la réduction des vitesses est efficace pour améliorer la sécurité, comment en convaincre les automobilistes? «85 % des Français y sont hostiles», a rappelé Daniel Quéro, président de l’association 40 Millions d’automobilistes qui réprouve tout nouveau tour de vis. «Faisons déjà respecter les vitesses qui existent», a renchéri France Wolf de la Fédération française des motards en colère.
Pressentant que cet argument allait être mis en avant, les experts dans leurs conclusions ont d’ailleurs prévu deux options. Une ligne dure, avec un 80 km/h sur tout le réseau bidirectionnel. Une ligne plus souple, avec certains itinéraires qui garderaient le 90 km/h. «La première option présente l’avantage d’une plus grande simplicité, la seconde d’une acceptabilité attendue plus large», est-il écrit dans le rapport. La première offre a aussi l’avantage d’épargner plus de vies – entre 350 et 400 – comme l’a rappelé le professeur Bernard Laumon, qui présentait ces conclusions. La seconde n’en sauverait que 210 à 240.
Les scientifiques se sont vu par ailleurs reprocher de ne pas aborder l’éducation routière. «Ce qui tue sur la route, ce n’est pas un défaut de connaissance, mais un défaut de comportement et ça ne se corrige pas avec de la répression supplémentaire», a ainsi réagi Gérard Acourt, représentant le groupe «École de conduite française».
Les éthylotests antidémarrage devraient être mis en place «sans délai»
Pas le moins du monde déstabilisé, Bernard Laumon a rappelé quelle avait été la mission des experts: trouver des solutions pour passer sous la barre des 2000 morts d’ici à 2020, selon l’objectif fixé par le ministre de l’Intérieur, Manuel Valls. Pour répondre à cet «objectif ambitieux», il fallait donc, selon lui, proposer en priorité «des mesures de rupture». D’autres propositions seront, a-t-il rappelé, prochainement présentées dans un second rapport. Un «tome II», dans lequel l’éducation routière sera abordée.
Et pour atteindre cet objectif, Bernard Laumon a notamment évoqué la mise en place d’éthylotests antidémarrage. Il a rappelé que cette mesure devait être mise en œuvre «sans délai».
Chantal Perrichon, présidente de la Ligue contre la violence routière, s’inquiète du retard pris dans le vote des recommandations sur la vitesse. Faudra-t-il attendre un calendrier plus favorable? Questionné sur l’absence de CNSR avant les municipales, son président, Armand Jung, a rétorqué qu’il ne travaillait pas «en fonction d’échéances politiques». «Si les prochaines recommandations sont prêtes, je réunirai un CNSR en février», a-t-il affirmé, en saisissant pour l’heure les services de l’État. Ces derniers doivent lui dire combien coûtera un changement de panneaux de vitesse sur le réseau secondaire.
Permis: près de 15 millions de points perdus en 2012
Alors que les infractions traitées ont fait un bond de 20,8 %, le nombre de points retirés a augmenté de 18,5 %par rapport à 2011: 14.336.756 contre 12.096.911.
Les usagers de la route ont par ailleurs plus de mal à rétablir la situation. 2.400.456 d’entre eux ont pu reconstituer leur capital initial après trois ans sans écart sur la route. Ce qui constitue une baisse de 2,9 %par rapport à 2011. De même, 4.723.214 automobilistes ont récupéré un point au bout de six mois ou un an sans nouvelle faute commise. Soit une chute de 6,8 % par rapport à 2011.
«Les chiffres montrent que les conducteurs commettent des infractions plus fréquemment, dont certains durant les 6 mois de probation», note le rapport.
Autre donnée intéressante: la grande majorité des points perdus, (70,9 %) est liée à des infractions entraînant la perte d’un point à chaque fois. Il s’agit presque exclusivement, selon le rapport, d’excès de vitesse de moins de 20km/h. Ces derniers sont d’ailleursen nette augmentation – de plus de 25 % – par rapport à 2011.